Article paru dans Telex Var N°1696 du 31/07/2013
& dans le supplément magazine « Spécial Eté aout 2013 »
J’suis pas une sainte, moi !
D’ordinaire, la presse parle de Maurane pour ses prouesses vocales, ses duos fusionnels ou ses prises de position humanistes… Mais récemment, Maurane a plutôt défrayé les chroniques « cancanières » de la presse people suite à quelques tweeters… euh… comment dire… trop tweetés ! Mais à vrai dire, Maurane n’a pas besoin des touches pour faire mouche. La plus française des belges a son caractère et le revendique ! Tout Maurane qu’elle est, Claudine est restée toujours la même… et c’est pas prêt de changer !!
Maurane est comme tout le monde… Enfin presque ! Car tout le monde n’a pas son grain de voix… qui, disons-le clairement, est même unique au monde ! Une voix si profonde pouvant exprimer une bouleversante fragilité. Une voix chaude à vous mettre des frissons partout. Une voix tendre et veloutée qui sait décaper le swing. Une voix qu’elle sait aussi parfaitement utiliser pour dire tout haut… ce qu’elle pense tout haut ! Brute de pomme, nature et entière, quoiqu’on en dise, Maurane parle avec son cœur et chante avec ses tripes. Grande interview « authentiquement enjouée » avec Maurane. Mais pouvait-il en être autrement ?
Christine : Maurane, on pourrait dire que vous êtes la plus Française des Belges. La France, c’est un choix du cœur ou c’est l’opportunité de la vie qui vous y a amenée ?
Maurane : La plus Française des Belges, la plus Belge des Québécoises, la plus Belge des Françaises, c’est un peu comme vous voulez ! (rires). En fait, je me sens surtout une citoyenne du monde. J’ai la chance d’avoir un métier qui me fait beaucoup voyager et je trouve qu’il y a des endroits magiques et des gens magnifiques absolument partout ! Bref, je fais un métier privilégié mais j’avoue qu’en France, on m’a toujours très bien considérée.
Christine : Qu’est-ce qui vous rend si « sympathique » ?
Maurane : Ouh la !! Vous dites ça mais certains pourraient dire le contraire !!! (rires).
Christine : Je dis ça parce que votre public vous considère un peu comme une amie. Ce capital sympathie tient à votre personnalité ?
Maurane : J’avoue que souvent, on me compare à une grande ou une petite sœur, à une maman ou une mamie aussi !! C’est vrai qu’il y a un truc familial qui revient toujours et ce n’est pas pour me déplaire car j’ai une toute petite famille… Je suis très présente sur les réseaux sociaux parce que j’aime bien parler avec les gens, je suis une vraie concierge !! Il est même arrivé que certains fans deviennent, au fil des ans, de véritables amis… Après, il faut savoir quand même garder un certain recul car parfois, ça peut mal se passer. J’en ai fait les frais récemment avec tweeter…
J’ai beau m’appeler Maurane sur scène, je reste Claudine dans la vie
Christine : Etre nature et spontanée, avec vos coups de gueule, votre caractère, votre personnalité… ce n’est pas difficile de rester soi-même quand on baigne en permanence dans ce milieu du showbiz ?
Maurane : C’est justement cet état d’esprit qui m’énerve un peu ! Sous prétexte que vous êtes une personne publique, un « people » comme on dit, il faut soi-disant montrer l’exemple et faire attention à vos comportements. Enfin quoi, j’suis pas une sainte, moi ! Effectivement, j’ai mes coups de gueule et mes états d’âme. J’ai le droit de trouver des gens très cons qui eux-mêmes doivent me trouver très conne et c’est tout à fait normal… on ne peut pas plaire à tout le monde !!! J’ai beau m’appeler Maurane sur scène, je reste Claudine dans la vie, j’ai 52 ans aujourd’hui et je ne vois pas pourquoi je devrais changer d’attitude alors que j’ai un caractère foncièrement sincère ! J’en connais une qui est exactement comme moi, c’est Françoise Hardy. Elle est capable de vous dire « ta chanson… qu’est-ce qu’elle est belle… » comme elle est capable de vous dire « ce que tu viens de chanter… c’est de la merde !!! ». Pour moi, ça fait partie de ses qualités. Elle est directe, franche, jamais dans le calcul et c’est pour ça que je l’aime !
Christine : Vous parliez de famille. La naissance de votre fille Lou a véritablement bouleversé votre vie…
Maurane : Ah…ça change tout ! J’ai jamais autant consulté les psys que depuis la naissance de ma fille !!! Parce que c’est un retour en arrière et en même temps, c’est vraiment une fusée dans le futur. Il faut aller vite pour essayer de comprendre comment fonctionne un enfant… Bien des fois je me sentais si maladroite ! C’est un métier d’être parent, peut-être d’ailleurs le plus difficile ! Lou a 19 ans maintenant et elle semble plutôt bien dans sa peau… comme quoi, je m’en suis pas si mal sortie !!
Christine : Elle entend suivre le chemin artistique de sa maman ?
Maurane : Lou est très sensible à l’artistique. Elle n’est pas vraiment chanteuse mais elle adore ça et de temps en temps elle vient me rejoindre sur scène pour chanter « Ma belle », une chanson qui la touche beaucoup. Et puis elle peint, elle a déjà exposé au moins 5 fois. A 19 ans c’est pas mal quand même ! Elle est en Sciences Po, elle est fan de cinéma, de bouquins et de nourriture diététique !!! (rires)
J’ai partagé bien des trucs avec Claude Nougaro, des moments magnifiques
Christine : Et vous Maurane, vous êtes une assoiffée des mots, des textes et vous avez été très inspirée par de grands auteurs et compositeurs français. Mais pour vous, le maître incontesté c’est Claude Nougaro…
Maurane : Oh oui définitivement ! Je ne vais pas faire du mysticisme à deux balles, mais j’ai l’impression de le croiser tout le temps, de le sentir tout près. Avec toutes ses empreintes qu’il a laissées de poésie, de musique, de swing… sa voix, sa présence, tout ça est resté intact, bien vivant…J’ai eu la chance de le connaître très bien même s’il fait partie des personnes avec qui je me suis beaucoup, beaucoup engueulé !! (rires). Il pouvait être râleur, misogyne et c’était pas toujours de la tarte ( !). Mais il savait aussi être tendre et super généreux. Il avait un humour décapant. J’ai partagé bien des trucs avec lui, des moments magnifiques. Claude rencontrait toujours « les femmes de sa vie » mais lorsqu’il a connu Hélène, il a dit « j’ai rencontré la femme de ma mort » ! Et c’est vrai qu’elle a en elle tout ce dont il avait besoin. Hélène Nougaro est une très belle personne…
Christine : Et depuis l’album hommage que vous lui avez consacré en 2009, est-ce que vous abordez le swing et le jazz différemment ?
Maurane : Ah oui ! On est 4 sur scène et je peux vous dire que ça décape !! J’ai à mes côtés des grands…grands musiciens, des artistes à part entière avec leurs propres projets. Et depuis que je travaille avec eux, je suis portée, transportée et je fais beaucoup de progrès. On navigue dans tous les paysages du jazz, hispano, latino, brésilien, oriental…
Christine : C’est l’idéal pour la citoyenne du monde que vous êtes !
Maurane : Exactement ! Vous avez tout compris !! Ce sont des gens extras, on s’adore et c’est le pied ! On partage beaucoup d’intimité et de convivialité, on se met en valeur les uns, les autres. Et puis, dans cet esprit, on prend un plaisir fou à retourner dans des petites salles, avec une vraie proximité du public. Et comme dirait ma grande copine Catherine Lara, « je préfère les petites salles aux grandes propres » !!! (rires)
Qu’il y ait 20, 200 ou 2 000 personnes dans la salle, pour moi tout va bien !
Christine : Cependant, le Nougaro qui est en vous ne fait-il pas un peu d’ombre à l’artiste Maurane… ?
Maurane : Ah… vous faites référence à l’album « Fais-moi une fleur » qui a suivi et qui a moins bien marché ?! D’une façon générale, les albums ne se vendent plus très bien aujourd’hui et les maisons de disques sont désespérées. Moi vous savez, je continue mon petit bout de chemin. Je pense que je ferai toujours des albums mais avec des budgets plus restreints. Il faut apprendre à désapprendre !! J’ai commencé dans la rue à 14 ans, et j’ai tourné dans les cafés concerts où j’ai appris l’essentiel de mon métier. Et l’essentiel de mon métier, c’est la scène. J’aime être sur la route pour aller à la rencontre des gens. Qu’il y ait 20, 200 ou 2 000 personnes dans la salle, pour moi tout va bien !
Christine : Vous avez reçu moultes récompenses aussi prestigieuses les unes que les autres…
Maurane : … Ah non ! Pardon ! Elles ne sont pas toutes prestigieuses puisque la dernière en date que j’ai reçue c’est « la mouche d’or » qui récompense celle qui n’arrive pas à contrôler ses émotions !! Je la trimbale partout et je fais des photos avec ma mouche d’or dans toutes les villes où je passe. C’est la mouche de la fille qui peut pas fermer sa gueule !! Mais je l’assume et avant que je la mette en veilleuse, on n’est pas couché !!! (éclats de rires)
Le jour où je m’arrêterai de rêver, c’est que je serai morte…
Christine : Bon mais hormis cette récompense, vous avez réalisé une brillante carrière. Est-ce qu’aujourd’hui il vous manque quelque chose pour être une artiste comblée ?
Maurane : Le jour où je m’arrêterai de rêver, c’est que je serai morte… Mais, pour autant, je peux dire que je suis comblée. J’ai un public fidèle, enthousiaste et je n’espère qu’une chose : que ça continue le plus longtemps possible. Je suis une femme heureuse, épanouie et je remercie mon étoile tous les jours pour cette vie extraordinaire !
Christine : Et le cinéma ?
Maurane : Sylvia Allègre, l’assistante de Jean Becker, m’a contactée pour un tout petit rôle avec 3 phrases à dire, mais bien évidemment j’ai tout de suite accepté !! Même si je devais jouer le rôle de Madame Pipi qui dit « bonjour, c’est 50 centimes, au revoir ! », je serais là pour le faire ! (rires). J’adore le cinéma et j’aimerais bien tourner plus, mais encore une fois, je ne suis pas obsédée par un grand rôle. J’apprends parce que c’est un métier et je ne me prends pas pour une actrice. Il y a des opportunités de temps en temps que j’attrape au vol et ça me fait bien plaisir…
Retrouvez toutes les photos du concert, réalisées par Christine